Par une journée d'hiver [Eric *-* ]

Ce fut avec une énorme difficulté que le Shinigami ouvrit les yeux ce matin-là, alors que le réveil qui était non loin le tirait de son sommeil, lui signalant qu’il serait peut-être bon qu’il se bouge s’il ne voulait pas être en retard au travail. Alan n’aimait pas être en retard, que ce soit au travail ou pour quoique ce soit. Généralement, il ne traînait pas trop lors de son réveil, se contentant de s’étirer, avant de balancer toutes les couettes qu’il avait au-dessus de lui pour se préparer. Mais cette fois-ci, il lâcha simplement un grognement avant d’essayer de se relever. Chose qui échoua lamentablement. Après quelques secondes où il tenta de relever ne serait-ce que son dos, il se laissa retomber sur son oreiller. Trop dur. Et trop froid. Frissonnant, il se reglissa sous les couvertures, se pelotonnant en essayant d’avoir le plus de chaleur possible.

Il se serait certainement endormi si le réveil n’était pas revenu de plus belle. Bon. Il fallait vraiment qu’il se lève, fatigué ou pas. Soupirant, et à contrecœur, il fit une nouvelle tentative. Mais il avait à peine atteints le réveil pour l’arrêter lui et son bruit agaçant qu’une quinte de toux le pris. Frissonnant une nouvelle fois, il lança un regard à la fenêtre, vérifiant qu’elle n’était pas mal fermée. …Même pas. Pourquoi avait-il si froid ? Il n’en avait pas la moindre idée. Enfin si. Une lui avait traversé l’esprit mais il n’avait pas envie de l’entendre. Mais le mal de tête qui se pointa lui donna raison. Génial. Il était malade. Comment ? Il avait sans doute du attraper froid la dernière fois qu’il était sortie où une bête raison dans le genre. Il y avait des jours où il haïssait sa constitution et sa santé.

Que faire ? Allez tout de même travailler ou rester à se reposer ? Les deux le tentaient, mais la première était plus raisonnable. …Quoique. Si son état s’empirait, on l’emmènerait certainement à l’infirmerie. Il haïssait tout simplement cet endroit. Soupirant, une nouvelle quinte de toux le décida sur la chose à faire, et il retourna sur ses pas, se reblotissant dans son lit. Au moins là il faisait bien chaud. Cependant quelque chose le tracassait : il ne savait pas comment prévenir Eric. Il ne voulait pas qu’il s’inquiète, après tout ce n’était pas grand-chose. Se relevant légèrement sur son lit, il réfléchit durant quelques instants avant de grimacer. Le mal de tête n’avait pas l’air de vouloir le laisser tranquille.

Se recouchant une énième fois, il chercha plusieurs moyens de contacter le blond, tous aussi farfelus et impossibles les uns que les autres, avant que le sommeil n’ait raison de lui, sans qu’il n’ait pu faire quoi que ce soit. Il ne se réveilla que quelques heures plus tard. Rouvrant les yeux avec un peu plus de facilité, il étouffa un bâillement et bougea légèrement regardant par la fenêtre la neige tomber. Il n’aimait pas l’hiver. Il faisait trop froid, et sa condition physique était encore pire que d’habitude. ..Mais il n’aimait pas non plus l’été, il faisait trop chaud. Il préférait l’automne et le printemps. Mais bon cela n’avait pas grande importance. Il resta quelques instants sans bouger dans son lit, avant d’entendre un léger bruit. Comme celui que faisait une clef. Fronçant légèrement les sourcils, il mit une dizaine de secondes avant de se rendre compte qu’une seule autre personne que lui pouvait avoir les clefs de cette porte. Il bougea une nouvelle fois sous la tonne de couette dans laquelle il avait l’habitude de se pelotonner afin d’avoir bien chaud.

’-E…Eric ?’

Lança-t-il d’une voix rauque, faute de ne pas avoir parlé avant. Bon la question était un peu idiote, il ne pouvait s’agir certainement que du blond. Alan préféra se mettre en position assise sur son lit, et après quelques instants, remis les couettes sur ses épaules. Non il faisait vraiment trop froid. Il étouffa un deuxième bâillement avant de voir son ancien mentor arriver dans la pièce.

’-Je suis désolé, j’ai voulu te prévenir ce matin mais…Je ne savais pas comment…’

Toujours sous ses couvertures, Alan sorti timidement un bras, cherchant à tâtons ses verres qu’il n’avait pas dû poser très loin quelques heures avant, sachant pertinemment que sinon il aurait du mal. D’ailleurs il ne lui fallut qu’une dizaine de secondes avant de poser sa main sur la monture, et la mettre sur son nez. De suite, tout parut plus clair. Bon ce n’était pas comme s’il ne distinguait rien avant mais bon. Tournant la tête vers son ancien mentor, il esquissa un sourire en distinguant nettement ses traits. C’était plus fort que lui, dès qu’il l’apercevait, il ne pouvait pas s’empêcher de sourire, le savoir à ses côtés le rendait heureux.

Petit à petit, il remarqua qu’il faisait de plus en plus chaud, il se demanda un instant à quoi c’était dû, avant de voir que l’autre Shinigami avait allumé son poêle. Effectivement, ce n’était pas une mauvaise idée, mais étant donné qu’il avait fait à peine un ou deux pas le matin même et qu’il avait dormi le reste du temps, il n’aurait pas su le faire. Quoiqu’il en soit, malgré le fait qu’il fasse un peu plus chaud, il garda ses couvertures sur lui, regardant Eric s’approcher. Il s’en voulait de ne pas avoir su le prévenir. Il se sentait coupable et détourna le regard alors qu’il lui disait que ce n’était pas de sa faute. Bien évidemment que cela l’était, et on n’allait pas lui sortir cette évidence de la tête de sitôt.

’-Si…Enfin maintenant de toute façon c’est trop tard.’

Lança-t-il l’air coupable, avant de sentir quelque chose de frais sur son front. Remarquant qu’il s’agissait de la main d’Eric, il reporta son attention sur lui. Le brun avait envie qu’elle reste là, ou même n’importe où tant qu’elle le touchait, l’effleurait. Ce contact, bien que futile lui faisait le plus grand bien. Il en vint à fermer les yeux, jusqu’à ce que le blond lui demande ce qu’il avait, la raison de sa non-venue au travail. Il était vrai que c’était plutôt rare, il aimait bien faire les choses à fond, et le travail en faisait partie. Il était touché par le fait qu’il s’inquiétait pour lui, mais il ne voulait pas lui créer d’autres problèmes non plus.

’-Ce n’était pas la grande forme dirons-nous. J’ai du attraper froid à un moment…Je préférais ne pas me retrouver à l’infirmerie à la fin de la journée à devoir avaler tous ces…trucs’

Réaction assez gamine, mais tant qu’il pouvait éviter de s’y rendre, pourquoi ne pas le faire ? En plus, ici il se sentait déjà un peu mieux, avec un peu de chance il pourrait reprendre demain, alors que là-bas on l’aurait forcé à rester dans un lit qui n’était même pas le sien, et beaucoup moins confortable, quelques jours de plus. Et avec qu’une seule couverture. Et puis en plus là-bas les visites étaient limitées. Bon, pas que des tonnes de personnes venaient le voir, mais ici au moins personne n’irait demander à Eric de partir soi-disant parce que cela le fatiguerait s’il restait trop longtemps.

’-Et puis je n’avais pas non plus envie de te refiler quoique ce soit’

Lâcha-t-il plus doucement. Même s’il n’y avait pas beaucoup de risques, il était hors de question que le Dieu de la Mort tombe malade par sa faute. C’était la dernière des choses à faire, vraiment. Enfin, il afficha un sourire sur ses lèvres, plus pour rassurer son interlocuteur qu’autre chose.

’-Ne t’en fais pas, ça vé déjà mieux ! ‘

Surtout parce qu’il était là. Sinon, il serait sans doute resté amorphe dans son lit. Vraiment, la présence d’Eric devait avoir des propriétés curatives sur lui, cela ne pouvait pas s’expliquer autrement. Quoiqu’il en soit, il fronça légèrement les sourcils alors qu’il regardait le col du blond, trop ouvert une fois de plus.

’-Et ferme-moi ça tu vas réussir à me donner encore plus froid, ou tu finiras par attraper froid, au choix.’

Dit-il en laissant légèrement retomber ses couvertures pour refermer le col de son ancien mentor. Après, il s’occupa de resserrer sa cravate, regarda le résultat et fit une moue avant de la remettre comme avant.

’-Je préfère comme ça finalement…’

Donna-t-il comme simple explication, avant de se bouger légèrement sur son lit, faisant de la place pour l’être qu’il chérissait au fond de lui-même. Tapotant à l’aide de sa main la place à côté de lui, il lui sourit de nouveau

’-Fais comme chez-toi, installe-toi !’

Subtile tentative en même temps de pouvoir profiter de sa proximité. Enfin, en attendant sa réponse, il étira une nouvelle fois ses muscles légèrement endoloris avant de reporter son attention sur l’autre Dieu de la Mort. Non vraiment, il était simplement parfait, il n’y avait rien à redire là-dessus.

Autant il se sentait mal le matin même, autant maintenant il se sentait on ne peut mieux. Les yeux maintenant fermés, il avait assez chaud avec ses couvertures plus le poêle et pour couronner le tout, Eric était juste à ses côtés. Sa main ne quittant pas son visage. Il se serait volontiers pelotonné contre lui si jamais il ne craignait pas la réaction du blond. Il avait peur de le perdre, et si cela venait à arriver, cela équivaudrait à la fin du monde pour lui. Il n’avait personne d’autre sur qui reposer en cas de besoin. Mais il ne voulait personne d’autre mis à part Eric. C’était la seule et unique personne en laquelle il avait placé son entière confiance. Il ne voulait personne d’autre que lui. Il le voulait à jamais à ses côtés. Seulement pour lui. C’était purement égoïste. Il le savait, mais dès que quelqu’un s’approchait un peu trop près de lui, il ne le supportait pas.

Ce fut alors que le blond enleva une de ses couvertures. Le brun frissonna de plus belle, bien qu’il fasse assez chaud, il était plutôt frileux. Il savait parfaitement qu’il valait mieux ne pas trop se couvrir non plus, mais il avait pris l’habitude de dormir avec une tonne de couverture. Il lâcha un léger gémissement, signe de son mécontentement et regarda la couverture d’un air de chien battu. Reportant son attention sur son ancien mentor, il le laissa s’allonger à ses côtés, profitant pour humer son parfum. Il ne voulait pas que le temps continue sa course ridicule, il voulait rester pour toujours à ses côtés.

A son plus grand plaisir, il continuait ses douces caresses. Il en venait presque à oublier qu’il avait légèrement froid. Non. Il l’avait oublié. Eric était plus important. Puis une envie lui vint. Une envie d’aller se réfugier dans ses bras. Une idée lui traversa alors l’esprit. Il se rallongea doucement à ses côtés, n’ayant pas la moindre envie que sa main ne quitte son visage, et alla se mettre contre lui, les yeux pétillants.

’-Hm…J’ai toujours froid.’

Lança-t-il d’un ton exagérément maladif, en espérant qu’Eric n’essayerait pas de le repousser. C’est alors que ce dernier reprend la parole, mais le brun ne lui répond pas de suite, profitant encore de ses caresses. Non il ne voulait pas qu’elles s’arrêtent. C’était à peine s’il osait respirer. Eric se rendait-il compte de l’effet qu’il avait sur lui ? Il n’en savait rien. Il avait juste envie de se laisser aller dans ses bras non seulement mais aussi de lui montrer tout l’amour qu’il portait pour lui. Il avait du mal à aligner deux pensées cohérentes pour le moment, et la seule chose qu’il avait envie de dire à Eric était une simple petite phrase. Sans doute une des plus courtes qu’il lui aurait dite, mais la plus difficile.

’-S…Sans doute. Mais je t’avouerais que si j’ai droit au même accueil, je risque d’être malade plus souvent.’

Lança-t-il avec un léger rire avant de se rendre compte de ses paroles. …Non, il ne l’avait quand même pas dis, si ? …Si. Le rouge lui monta automatiquement aux joues, et il baissa légèrement la tête, fixant la chemise d’Eric.

’-O…Oublie ce que j’ai dit’

Dit-il en se mordant la lèvre inférieure. Ceci dit, il ne peut se résigner à lâcher le blond. Non il reste lové contre lui, tant qu’il ne lui dirait pas de partir, il resterait dans cette position. Bon sang, comment lui dire ce qu’il ressentait tout en s’assurant qu’il ne le prendrait pas mal, qu’il ne réagirait pas mal ?

Fermant totalement les yeux, le brun se laissa aller contre son ancien mentor en lâchant un léger soupir de contentement. Il se croirait à la limite dans un rêve. N’était-ce pas trop beau pour être vrai ? Mais peu importe, s’il rêvait ou non. S’il se réveillait et que rien ne s’était passé, tant pis, et si c’était la réalité…Tant mieux. Mais dans les deux cas, il profiterait de ce moment. Ceci dit, il rouvrit légèrement les yeux lorsqu’il sentit une pression venant de la part de son homologue. Se sentant doucement repoussé, Alan finit par rouvrir totalement les yeux, regardant le blond d’un air, mi attristé, mi inquiet. Mais il ne fit que s’allonger complètement, avant de le reprendre dans ses bras. Et le brun face à ce câlin ne pût s’empêcher de se blottir encore un peu plus contre lui. Rêve ou pas, il avait eu peur de sa réaction, et avait cru un moment qu’il allait l’envoyer balader. Mais ce n’était pas le cas.

A vrai dire, il n’avait jamais été si proche de lui, mais n’allait pas s’en plaindre. Il ne voulait pas quitter cette position, même si jamais n’importe qui entrait à ce moment-là penserait tout, sauf qu’ils étaient de simples amis. …Mais n’étaient-ils que des amis ? Au fond, Alan savait pertinemment les sentiments qu’il nourrissait pour le blond, il les acceptait même mais ne s’était jamais résolu à les lui exposer. De l’amitié, il n’en ressentait pas tant que cela envers lui, c’était plus profond, beaucoup plus profond que de l’amitié. Il ne put s’empêcher de frissonner lorsqu’il le serra encore un peu plus contre lui, sentant maintenant la moindre parcelle de ce corps parfait contre lequel il était blottit.

C’est alors qu’il avait pris la parole, regrettant ses mots peu après. Maintenant, il était quasiment sûr et certain qu’Eric allait l’envoyer balader. Après tout, pourquoi le verrait-il autrement qu’un ami lui ? Il n’y avait aucune raison pour qu’il partage ses sentiments de son point de vue. Attendant les mots qui l’achèveraient sans aucun doute mentalement, le brun ferma une nouvelle fois les yeux, continuant de martyriser sa lèvre tout en essayant de respirer le moins possible, comme si cela allait aider à faire passer le temps plus vite, ou à faire oublier sa phrase. Il n’osait pas bouger. Il ne voulait pas bouger non plus.

Le blond prit la parole à son tour. Parlant de la neige. Pourquoi abordait-il ce sujet maintenant ? Mais alors qu’il relevait doucement la tête, afin de la regarder à son tour, il remarqua qu’il le fixait, sa main n’ayant toujours pas arrêté ses caresses. …A y réfléchir, c’était un bon point non ? S’il l’avait réellement vexé, il l’aurait enlevée non ? Alan eut à peine cette pensée que la dite main partit. Pour aller se poser autre part sur son visage. En voyant la tête qu’il faisait, plus sa phrase, il s’arrêta totalement de respirer, ne s’en rendant même pas compte, attendant la suite. Il espère entendre trois mots, ou l’équivalent. Il était pendu à ses lèvres, et n’importe quoi aurait pu se passer à ses côtés qu’il n’aurait absolument pas réagit. Seul ce qu’allait dire le blond lui importait.

Un murmure parvint alors à ses oreilles, lui portant les mots espérés. Le coin de sa bouche tressaillit, alors qu’il se demandait s’il avait réellement bien entendu, ou si l’autre n’allait pas sortir d’un moment à l’autre ‘ premier avril !’. Mais vu la tête qu’il faisait, il n’en avait pas l’intention. Et même s’il n’avait pas parlé très fort, le brun était certain des mots qu’il avait entendus. Était-ce seulement possible ? Il porta à son tour sa main sur le visage de son ancien mentor, comme pour s’assurer qu’il ne s’agissait pas d’une illusion. L’espoir naissant en lui vint former des étoiles dans ses yeux, alors qu’un doux sourire venait s’exposer sur son visage. Les paroles qu’il venait de lui prononcer étaient sincères, il en était certain.

Le plus petit des deux ouvrit la bouche pour parler, mais les mots lui manquèrent. Que lui dire exactement ? Et puis pourquoi s’embarrasser de paroles ? Eric attendait certainement une quelconque réaction de sa part, et qu’il s’agisse d’un geste ou d’une parole, cela ne devait pas avoir une grande importance. Son autre main légèrement tremblante, il leva la tête avant de passer son bras autour du cou du Faucheur. Mais alors qu’il se rapprochait encore lui, et qu’il n’était plus qu’à quelques millimètres de son visage, un doute surgit dans son esprit.

’-D…Dis-moi que ce n’est pas qu’une simple aventure pour toi.’

Il n’avait pas pu s’en empêcher, cela avait été plus fort que lui. Lui revinrent en tête tous les gestes attentionnés d’Eric, et le temps qu’il avait passé auprès de lui lorsqu’il avait été malade, tout comme aujourd’hui. Il secoua légèrement la tête à son tour. Il avait parlé trop vite. Une fois de plus.

’-Non…Tu ne me ferais pas ça…Excuse-moi’

Se corrigea-t-il quelques secondes plus tard ,avant de se demander comment il pouvait bien se faire réellement pardonner de ses paroles. Il regarda durant quelques instants le blond qui lui faisait face, et dont il sentait le souffle sur lui. Il attendait ça depuis trop longtemps . Bon pour une fois lance-toi, l’occasion ne se représentera pas des milliers de fois. Se redonnant une dernière fois du courage, le brun hésita quelques instants avant de sceller quelque peu maladroitement ses lèvres avec celles de son binôme.
.

En cet instant, strictement plus rien ne comptait. Juste cinq lettres étaient importantes à ses yeux, se démarquant des autres, formant un seul mot, un seul prénom dans son esprit. Eric. Les yeux fermés, il laissait maintenant sa main se balader dans le cou de son partenaire, doucement, voulant apprendre par cœur ses traits. Qui frôlaient la perfection. Maintenant, c’était sûr et certain, il ne s’était jamais senti aussi bien que dans ses bras l’embrassant. Geste qu’il avait toujours craint de faire jusqu’à présent, mais qu’il ne regrettait absolument pas maintenant. On lui aurait dit le matin même ce qu’il se passait en ce moment qu’il n’aurait certainement pas cru. Lui avoir le cran d’embrasser son ancien mentor ? Impossible. Mais il venait de démontrer le contraire. En même temps , maintenant que le blond lui avait avoué ses sentiments, c’était plus facile.

Ses lèvres étaient on ne peut plus douces. Le moment qu’il vivait était indescriptible, beaucoup mieux que ce qu’il aurait imaginé en tout cas. Il voulait rester indéfiniment contre lui, conter cette personne qu’il admirait et aimait depuis des années. Peu lui importait maintenant le nombre de jours qui lui restaient à vivre, il mourrait heureux dorénavant. Ses sentiments s’emmêlaient tout comme ses pensées. Qui impliquaient toutes son partenaire. Arriverait-il un jour à se séparer de lui de son plein gré ? En tout cas pour le moment. Peu lui importait le fait qu’il commençait à manquer d’air, les lèvres du blonds étaient beaucoup trop envoûtantes pour qu’il pense à les quitter. Ce fût d’ailleurs son ancien mentor qui rompit le baiser. Son premier baiser. Celui qu’il garderait en mémoire jusqu’à la fin.

Alors qu’il reprenait une respiration normale, le brun sourit à son tour face à celui que lui offrait l’être aimé. Il fondait littéralement devant lui, devant ce sourire qui lui était adressé. Lorsque la main d’Eric vint sur la sienne, il le laissa faire, se laissant guider, le laissant faire ce qu’il lui plaisait. Après tout, il ne pourrait rien lui refuser, certainement pas en ce moment. Il pouvait maintenant sentir son cœur qui battait la chamade, tout comme le sien. Cependant, il gardait son regard dans celui du bond, ne pouvant se détacher des yeux verts et or, qui étaient censés être les même que les siens. Faux, mis à part la couleur, il n’y avait aucun point commun. La lueur qui brillait dans ses yeux, la manière dont il le regardait était bien plus particulière que celle des autres.

Lorsqu’il reprit la parole, le sourire d’Alan s’amplifia, et il bougea légèrement, de façon à être le plus proche possible du blond. Depuis combien de temps se tournaient-ils autour sans que l’autre ne le remarque ? Le brun lui avait décidé d’arrêter de compter le nombre de fois où il s’était imaginé ce moment, cela lui aurait été impossible de retenir, même avec la meilleure volonté du monde. De son autre main, dont le bras était toujours passé derrière la nuque du plus âgé, il attrapa une mèche blonde qu’il entoura autour de son doigt.

’-J’aimerais beaucoup le savoir…’

Lança-t-il sans quitter son sourire, fixant toujours l’autre Dieu de la Mort. Non pour lui c’était un Dieu tout court. Le seul et l’unique. Maintenant, c’était certain il ne le quitterait plus d’une semelle et montrerait les crocs au premier qui oserait se montrer un peu trop avenant. Même s’il n’était pas très impressionnant, ce n’était pas une raison pour ne rien faire. Il était jaloux et possessif. Surtout en ce qui concernait Eric.

’-Depuis tout ce temps…Tu n’as pas arrêté d’être dans mes pensées…Quoique je fasse où que j’aille, tu étais toujours à mes côtés.’

Il n’empêche qu’ils faisaient une belle paire de crétins. Si jamais Eric n’avait pas décidé de lui dire qu’il l’aimait, durant encore combien de temps ils seraient restés là, chacun effrayé par la réaction qu’aurait l’autre ? Une chose était sûre, cette solitude qui l’avait accompagné, martyrisé dans un sens, lorsqu’il n’avait pas encore rencontré Eric, et qui revenait à la charge de temps à autre le soir était en train de perdre une énorme ‘bataille’. Le brun ne voulait plus la sentir, il ne voulait plus y refaire face. Jamais.

’-Je…ne veux plus être seul…Jamais.’

Rajouta-t-il doucement d’une voix légèrement suppliante en se blottissant encore un peu plus contre Eric. Il n’avait jamais su se faire à la solitude, quoiqu’il fasse. Mais malgré ça, il n’avait pas réussi à se lier d’amitié ni quoique ce soit d’autre avec qui que ce soit mis à part le blond. Mais il lui suffisait amplement, il ne voulait personne d’autre, dans un sens il se fermait au reste du monde, son ancien mentor étant le seul qui comptait. Il referma à moitié les yeux, humant le parfum de l’autre Shinigami, espérant que même lorsqu’il partirait, quand que ce soit, ce parfum reste le plus longtemps possible. Il était rassurant. Envoûtant.

Il n’avait toujours pas lâché la mèche dorée, la passant inlassablement entre ses doigts. Son regard quant à lui passait du visage à ladite mèche de son partenaire. Il ne savait pas sur lequel l’arrêter à vrai dire. Ils étaient tous les deux aussi parfait l’un que l’autre. Le brun ne pouvait donc pas arrêter son choix sur l’un ou l’autre. C’était impossible. Il continua donc de jouer avec les cheveux d’Eric, écoutant sa réponse par la même occasion. Oui il arrivait à faire deux choses en même temps, aussi étonnant que cela puisse paraître.

Enfin, il daigna lâcher la mèche blonde, et laissa plutôt son doigt se balader sur sa joue lisse. Il allait aussi se défaire difficilement d’elle. A vrai dire, il n’avait pas la moindre envie de s’éloigner de son ancien mentor, il voulait rester indéfiniment contre lui. S’il n’était pas obligé d’aller travailler, il l’aurait certainement fait. Bon…Il se contenterait d’aller squatter le bureau de son aimé, afin d’être sûr d’être avec lui dès qu’il rentrerait de mission alors que lui devrait rester à la Dispatch. Ainsi il passerait nettement plus de temps avec lui. Et il pourrait aussi vérifier qu’il faisait ses papiers correctement et à temps pour lui éviter des ennuis. Quoiqu’il en soit, Alan lui offrit un autre sourire, continuant sa légère caresse du bout du doigt

’-Jamais…Jamais cela n’aurait été de trop.’

De toute façon, il était tout bonnement impossible que le blond fasse quoique ce soit de travers. Il était parfait point final. Il avait toujours été son modèle, et quoi qu’il puisse faire, il le resterait aux yeux du brun. Ce dernier pouvait se montrer légèrement aveugle lorsqu’il s’agissait de trouver un défaut d’Eric. Il l’aimait trop, l’admirait trop pour ça. Durant quelques instants, il profita de la douce chaleur qu’il dégageait. C’était à peine s’il ne se mettait pas à ronronner tel un chat à côté d’un poêle lors d’une nuit d’hiver. Sauf que ce poêle-là, il était on ne peut plus précieux. Et le premier qui oserait s’en approcher se ramasserait un coup de griffe. Voir même plusieurs. Il se démènerait s’il le fallait pour que l’insouciant n’atteigne pas le poêle. Qui que ce soit, il ne ferait pas de quartier. Il était hors de question. Enfin de toute façon, il était inutile d’y penser pour le moment. Et puis Alan était tout simplement bien incapable de penser maintenant, les gestes tendres que lui offrait le blond étaient bien trop importants et plaisants pour qu’il puisse penser correctement. Ainsi, lui aussi occupait les pensées de son partenaire ? Il n’aurait jamais pensé une telle chose. De son point de vue, le blond ne le voyait que comme un élève ou quelque chose du genre. Strictement rien de plus. Un ami à la limite. Mais cela s’arrêtait là. L’étreinte que lui offrit son partenaire lui démontra bien le contraire. Non vraiment, il fallait qu’il reste indéfiniment contre lui. Il ne pourrait pas se sentir mieux. Jamais. Ses paroles, il ne les oublierait certainement pas. Il ferait tout pour les garder en mémoire en tout cas.

’- J’ai…Toujours voulu t’accompagner partout où tu étais’

Sauf que cela lui avait été bien impossible à nombreuses reprises. Mais là, le blond venait d’accomplir son plus grand rêve en quelques sortes. Il ferma les yeux lorsque son partenaire continua ses baisers. Un soupir de bien-être traversa ses lèvres, léger mais bien présent. Cependant, cela ne suffit pas à calmer l’angoisse naissante à propos de la solitude. Mais le murmure d’Eric par contre eut beaucoup plus de succès. Alors qu’il se resserrait légèrement l’emprise qu’il avait sur la chemise d’Eric, le remerciant comme il le pouvait, le blond l’embrassa, le faisant taire. Ce fut court, mais le brun en profita le plus possible. Il ne s’en lasserait jamais de ce contact. Il posa sa tête sur le torse de son aimé humant une fois de plus son parfum.

Lorsqu’il reprit la parole, Alan enfoui encore un peu plus sa tête dans les vêtements de son aîné. Il était…Beaucoup trop bon, parfait pour lui. Certes, il ferait la même chose pour Eric, mais ce dernier le méritait beaucoup plus que lui. Après tout, à combien de reprises l’avait-il sauvé, sorti d’un mauvais pas ? Alors que lui, il n’avait strictement rien fait. Il finit par relever la tête quelques secondes plus tard, et embrassa le Shinigami une nouvelle fois, doucement. Il le regarda ensuite, les yeux légèrement brillants.

’-Je te promets de faire attention. Mais…Visite-moi aussi souvent que tu le pourras. Enfin…Bien que je ne demande pas mieux que tu t’occupes de moi, je ne veux pas non plus t’empêcher de faire quoique ce soit d’autre…’

Même si pour lui, Eric était une priorité. Il passait avant tout, mais ce n’était pas très nouveau. Il en avait quasiment toujours été comme ça pour lui. Si jamais Eric avait besoin de lui ou quoi que ce soit dans le genre, le reste pouvait faire ce qu’il voulait, il irait d’abord faire tout ce qu’il pouvait pour le blond. Même s’il se mettait en danger. C’était la moindre des choses qu’il pouvait accomplir pour lui après tout.

’-Mh…Je te préviens je vais te coller encore plus qu’avant par contre’

Lança-t-il avec un sourire. Enfin, dans un sens, il hésitait à le faire, non pas qu’il ne voulait pas être près d’Eric, loin de là, mais le nombre de fois où certaines personnes lui avaient posé des questions sur la relation qu’il entretenait avec Eric, et qui parfois ne se gênaient absolument pas pour le mettre mal à l’aise, il s’en serait bien passé. …Non, le blond était beaucoup plus important que ça, tant pis, il enverrait balader lesdits gens. …Enfin, il essayerait du moins. Ou alors il pourrait tout simplement et tout bonnement les ignorer, c’était aussi un moyen.

Cette sorte de promesse que le blond venait de lui faire, Alan avait envie de lui dire qu’il n’aurait pas besoin de la tenir, du moins s’il acceptait qu’il aille partout où il allait, ne le lâchant pas d’une semelle. Mais premièrement, il n’oserait pas lui demander d’emménager chez lui pour que ce soit possible, et deuxièmement, …Il n’irait pas le contredire, c’était contre ses principes. Oui dans ses principes il était marqué de vénérer le blond et d’être en accord sur les mêmes points que les siens. Ou presque. Quoiqu’il en soit, il l’écouta chantonner alors que la main qu’il avait toujours rêvé de tenir précieusement dans la sienne ne vienne lui caresser les cheveux.

Pour la première fois, et sans doute la dernière, il remercia intérieurement les Epines, même si les chances pour qu’elles l’entendent étaient nulles. Mais bon, cela n’enlevait rien au fait que c’était sans aucun doute grâce à elles qu’il avait pu rencontrer Eric. Ou du moins que ce dernier était devenu son mentor. Il n’aurait rien eu, il serait resté sagement dans son coin en essayant de se faire oublier le plus possible et en s’effaçant comme il savait si bien le faire. Maintenant, peut-être que le blond serait venu lui parler, mais en tout cas lui n’aurait certainement jamais fais le premier pas.

Mais ce n’était pas le cas, alors pourquoi y penser ? A la place, un sourire vint orner ses lèvres en entendant les paroles de son partenaire. Il venait de lui donner la permission en quelques sortes de le coller encore plus que d’habitude. Et il ne s’en priverait absolument pas. Pas du tout même. Bon maintenant, certaines personnes se poseraient des questions, mais à quoi bon y porter grande attention ? Tant qu’il avait Eric à ses côtés, c’était la seule chose qui l’importait et qu’il demandait. C’était tout ce dont il avait besoin.

Sa respiration s’était totalement calmée, et il finit par fermer doucement les yeux, sa tête contre le blond, l’écoutant commencer une phrase. Intrigué qu’il ne la finisse pas, il releva légèrement la tête, de façon à pouvoir regarder le Shinigami. …installer un lit double ? Il le fixa, avec une lueur d’espoir dans le regard. Il hésita à intervenir, à prendre la parole, mais se ravisa en sentant la main du blond dans son dos, le faisant frissonner. Ce toucher…Il ne devrait jamais se terminer.

Pendu aux lèvres du plus grand, ce dernier finit enfin sa formulation et le brun l’observa pendant quelques instants, réfléchissant à sa réponse. Hésitant, il finit par bouger une de ses jambes, la passant par-dessus son ancien mentor. Là. Au moins maintenant il était certain que leur proximité ne serait pas compromise de sitôt et il pouvait encore mieux sentir le Faucheur contre lui.

’-Et…Et si je me sens trop seul plusieurs soir…Voir toujours, est-ce que je peux… ?’

Il rebaissa une nouvelle fois la tête sentant le rouge lui monter aux joues, ne voulant pas spécialement le montrer au blond. Bien que ce soit certainement raté vu la maigre distance qui les séparait. Plus pour occuper son esprit qu’autre chose, espérant lui faire oublier ce qu’il venait de demander et par conséquent que ces joues reprennent une teinte normale, il se mit à jouer d’une main non plus avec une des mèches blondes, mais avec la cravate de son partenaire, faisant coulisser doucement le nœud. Avant de l’enlever complètement et d’essayer de le refaire pour se la passer autour du cou. Sauf que l’une des raisons pour laquelle il ne daignait pas mettre la cravate d’uniforme était qu’il ne savait tout simplement pas en faire le nœud.

Après quelques essais, il laissa tomber l’affaire et alla reposer sa tête contre le cou du grand Shinigami, louchant légèrement sur une mèche blonde qui tombait non loin de ses yeux et souffla doucement dessus. Posant un doigt sur le cou de son ancien mentor, il le fit descendre le long d’une ligne imaginaire qui semblait suivre les courbes parfaites du plus âgé. Ceci dit, alors qu’il arrivait à son épaule, il s’arrêta et ferma une nouvelle fois les yeux, se calant contre son aîné encore un peu plus, lâchant un léger soupir.